On respire avec Mathieu Ménégaux

Je ne suis pas né avec mes romans,
mais je suis né avec un livre dans le berceau.

Librairie de Pithiviers   Votre quatrième roman, Disparaître, est paru le 8 janvier aux éditions Grasset. Pouvez-vous nous le présenter ?

Mathieu Ménégaux   Disparaître, c’est un peu un épisode de Columbo. Le roman commence par deux morts violentes, une défenestration et une noyade. Très vite, on comprend qui sont les deux victimes, comme on connaît le meurtrier au démarrage d’un Columbo. Tout l’enjeu du roman, et ce qui fait tourner les pages, c’est de comprendre ce qui a bien pu conduire les deux personnages à une fin tragique, et ce qui les lie.

Librairie de Pithiviers  Pourquoi choisissez-vous toujours des thèmes coup de poing – viols, incestes, maltraitance.. - et emprunts d’une certaine violence ou dont les personnages ont une part d’ombre importante…

Mathieu MénégauJ’écris sur la fragilité des situations. Sur le fait qu’en un instant, une vie bien tranquille, installée, peut basculer et virer au cauchemar ou à la tragédie. C’est une forme de catharsis, pour moi, une façon d’exorciser mes peurs. Qui sait où un événement peut vous conduire ?  Je ne sais pas si mes personnages ont une part d’ombre. Ils ont tous leurs angoisses, leurs secrets, leurs expériences, leur rapport à la vie. Je dirais qu’ils sont plutôt vous et moi, à l’exception de Maxime, dans  Un fils parfait, qui est le seul monstre de ma galerie de portraits.

J'ai attendu d'avoir une histoire à raconter
[...] et à 44 ans, je suis devenu auteur

Librairie de Pithiviers  Comment vous définissez-vous ? Etes-vous auteur, scénariste, écrivain, … ?

Mathieu MénégauJe suis multiple. Je suis un homme, un père, un époux, un consultant, un lecteur, un auteur, un grimpeur, un plongeur. Je n’aime pas les cases… Je ne crois pas pouvoir être encore qualifié d’écrivain, je manque de lettres de noblesse. J’aime bien le mot auteur. Allez, un auteur.

Librairie de Pithiviers   Comment êtes-vous venu à l’écriture ? Etes-vous né avec vos romans ou vous êtes-vous réveillée un jour en vous disant « je vais écrire… » ?

Mathieu Ménégaux   Je ne suis pas né avec mes romans, mais je suis né avec un livre dans le berceau. J’ai beaucoup lu, depuis tout petit, et je continue à être un insatiable lecteur. J’ai entretenu de longues correspondances, à l’époque où on s’écrivait autrement qu’en 140 caractères ou avec des émoticônes, et toujours mes correspondantes me disaient de faire quelque chose de ma plume. J’ai attendu d’avoir une histoire à raconter. Un jour, j’ai rêvé de l’histoire de Claire. Et à 44 ans, je suis devenu auteur.

Librairie de Pithiviers  Grasset, c’est quand même un sacré nom… Comment s’est fait le choix de cette maison d’édition ?

Mathieu Ménégaux   Ce sont eux qui m’ont choisi. J’ai envoyé le manuscrit de mon premier roman par la Poste à une dizaine d’éditeurs à Paris. Je ne connaissais rien ni personne dans le milieu de l’édition. Trois semaines après l’envoi, je recevais ce coup de téléphone, dont je me souviendrai toute ma vie. C’était le jour de France Nigeria en coupe du monde de football, le 30 juin 2014. Moins d’un an plus tard sortait Je me suis tue ».

Librairie de Pithiviers  Parlez-nous de vos TOC (troubles obsessionnels compulsifs) d’auteur. De quoi avez-vous absolument besoin pour écrire ?

Mathieu Ménégaux   J’ai besoin d’un ordinateur. C’est tout. Et je regarde le compteur de caractères. Mes romans font entre 200 et 250 000 signes. Ca me permet de savoir où j’en suis.

Librairie de Pithiviers  Faites-vous un important travail d’investigation préalable pour l’écriture de vos romans ?

Mathieu Ménégaux   Oui, très important. J’écris souvent en lien avec le thème de la justice. Aussi, je rencontre des policiers, des magistrats, des avocats, des psychologues, des légistes. Il est fondamental pour moi que tout soit crédible. Je ne veux rien laisser au hasard.

Librairie de Pithiviers   J’aime beaucoup cette phrase de Christian Bobin : « Peu de livres changent une vie. Et quand ils la changent, c’est pour toujours ». Vous pouvez nous parler d’un livre qui aurait changé votre vie ?

Mathieu Ménégaux   Ma vie, je ne sais pas, mais ma perception des choses, oui. L’Art de perdre, d’Alice Zeniter, est un livre qui m’a profondément marqué. Et qui a changé pour toujours le regard que je porte sur l’immigration et l’intégration des Algériens dans notre pays.

Librairie de Pithiviers  Si je vous demande de nous raconter une de vos journées type (hors confinement…)

Mathieu Ménégaux   Je travaille. Peu de lecteurs le savent, mais la littérature ne nourrit qu’une trentaine d’auteurs, en France, et je ne fais pas partie ce ceux-là. Je suis dans le conseil aux entreprises, et je passe beaucoup de temps avec mes clients. Je passe du temps avec mes filles, avec ma femme. Je vois des amis. Je joue aux cartes. Je fais du sport.

Librairie de Pithiviers    … et une de vos journées type (en confinement)

Mathieu Ménégaux   C’est à peu près pareil, sauf que je ne bouge pas de chez moi. L’importance des repas est surdimensionnée, c’est un peu l’animation de la journée : qu’est-ce qu’on mange ? Mes filles me manquent, elles sont chacune avec des amis, ailleurs. Mes sorties à vélo me manquent beaucoup. Hâte de pouvoir enfourcher à nouveau et aller en vallée de Chevreuse (c’est à plus d’un kilomètre de chez moi, hélas). Et une confidence, le foot à la télé me manque aussi, gravement.

Librairie de Pithiviers  Question subsidiaire : si vous deviez envoyer un petit message personnel pour soutenir les ami.e.s de la librairie de Pithiviers pendant cette période difficile…

Mathieu Ménégaux   Réjouissons-nous d’être en vie ! Et faites des listes de livres que vous irez acheter dès la ré-ouverture !