Lire à l'infini

Rentrée littéraire 2019 : ils sont 524 ! 524 nouveaux livres qui doivent trouver leur place en librairie. 524 titres qui attendent qu'on les lise. Mais comment fait-on pour lire 524 livres ? 

 

 

Je commence par les compter. Un, deux, trois, quatre, etc. 

Ceux qui sont dans les sacs rapportés de Paris, remplis jusqu'à la gueule, débordant au point de parfois se déchirer, surtout ceux en papier.

J'entame un tri, le nez qui plonge malgré moi dans les pages. Renifler, humer cette alchimie feuilletée encre papier qui donne à chacun un parfum un peu différent. Entêtant. Ennivrant.

La première liste manuscrite, appliquée, soignée. Auteur, titre, éditeur, date de parution. 

Je n'oublie pas ceux qui arrivent par la poste. Le flot continu, le flux régulier. Une, deux, trois quatre, etc. enveloppes kraft que, chaque jour, pressée, j'ouvre, impatiente.

Et puis le rangement dans une caisse en carton, un, deux, trois, quatre, etc., gentiment posés sur la tranche, les dos bien visibles, par ordre alphabétique d'auteur.

Le jeu des titres que je m'amuse à déchiffrer à l'endroit, à l'envers. Cadavres exquis de promesses littéraires.

La liste qui s'allonge, se rallonge, où je griffonne, rature. Zut j'ai oublié de noter la date. Je rajoute, je biffe, je coche. 

Les illustrations de couverture qui donnent à rêver. Illusion d'optique ? A moins qu'elles ne soient blanches et ne ressemblent à rien : ce ne sont encore que des épreuves. 

Les phrases piochées au hasard, les mots qui s'entrechoquent. Un, deux, trois, quatre, etc. Les fautes qu'on aimerait corriger mais non il faut juste lire. 

L'imaginaire qui trépigne, se met en branle. Actif. Trépidant.

L'envie. La hâte. Le désir. 

Le choix cornélien sur la liste qui, déjà, ne ressemble plus à rien.

Et puis le moment où d'inombrables il n'en reste plus qu'un. Unique. Celui que je tiens entre mes mains. Celui que je m'apprête à lire. 

En lire un, deux, trois, quatre, etc. Encore et encore. 

Lire à l'infini. 

Fabienne